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Les Bêtes du sud sauvage

 

Drame fantastique de Benh Zeitlin

Avec : Quvenzhané WallisDwight HenryLevy Easterly, plus

20121h32min

Synopsis

Hushpuppy, 6 ans, vit dans le bayou avec son père.
Brusquement, la nature s'emballe, la température monte, les glaciers fondent, libérant une armée d'aurochs.
Avec la montée des eaux, l'irruption des aurochs et la santé de son père qui décline, Hushpuppy décide de partir à la recherche de sa mère disparue.

 

 

 

Critique de Sören

Une oeuvre réaliste teintée de poésie sur un groupe d'individus vivant en autarcie au fin fond des bayous, leur univers se limite aux méandres des marécages de Louisiane séparé du monde "moderne" par une digue de béton.

La réalisation tient presque du documentaire, avec une caméra à l'épaule omniprésente, des mouvements de caméra très brusques, assez agaçants par moment d'ailleurs. Film indépendant oblige, les acteurs sont d'illustres inconnus mais délivrent un jeu très justes, notamment Quvenzhané Wallis, qui du haut de ses 9 ans impose de talent et la maîtrise de son rôle. Une actrice en herbe à suivre qui a déjà remporté une foule de récompense.

Un film plaisant à voir, même si le scénario a tendance à tout mélanger, à aborder des thèmes pour ensuite les oublier, en faire réapparaître d'autres mais ne pas les expliquer. Tout ce méli-mélo et l'absence de "fil rouge" peuvent laisser perplexe à la sortie du film, on a apprécié l'audace et l'inventivité du jeune réalisateur mais on déplore le manque de repères et de continuité dans l'oeuvre. Comme une bâtisse superbement édifiée mais dont le ciment serait impur, le risque c'est que tout s'effondre. Heureusement ce n'est pas le cas, car il y a tout de même une situation initiale et un résolution de l'intrigue. Ne serait-ce que par les sentiments du père pour sa fille, au départ ils sont simplement ceux de la responsabilité du géniteur envers son enfant, ils ne vivent pas dans la même maison, ne partagent pas les repas. Chacun à sa cabane fait de bric et de broc, on y admire, à travers sa survie, toute l'inventivité et la débrouillardise de Hushpuppy. Quand elle rencontre sa mère, elle redécouvre son père. Et c'est sur son lit de mort, que celui-ci accepte que tous les deux versent des larmes, chose qu'il interdisait formellement, comme l'usage des couverts pour manger, "à la dure" comme il dit ! Même si sa rudesse d'esprit et de coeur peuvent surprendre voire énerver, elle est légitime dans un univers où seules la chasse et la pêche permettent de vivre, chose que ne sait pas faire notre jeune héroïne.

Pour revenir sur les parties quasi inintelligibles du film, j'aborderai le thème des aurochs, je n'ai pas compris ce qu'ils apportaient au film, s'ils étaient une intervention du registre fantastique dans l'univers réaliste et même naturaliste du film, une métaphore des pérégrinations de la fillette dans le monde sauvage ? Que sais-je encore ? Ce sont toutes ces étrangetés qui ne me font pas totalement adhérer au film, même si on se laisse bercer par sa musique délicate et son esthétique travaillée. J'attends avec impatience le prochain film de Benh Zeitlin !

C'est un film qui passera sûrement inaperçu auprès du grand public et sera vite déprogrammé des grands multiplexes alors courez-y pour le voir.

Ma note Speed : SSSSS

 

 

Critique de Maël

Les bêtes du sud sauvage est un film singulier, difficilement comparable. L'entrée en matière est perturbante, puisque parfaitement inconnue. La situation d'énonciation est difficile à discerner, où ça se passe, quand ? Hushpupy est-elle un gars ou une fille ? Bon ça ok on s'en fou pas mal, mais bon !
Toujours est-il que l'accroche est étrange, mais par là elle est plutôt efficace, car on se pose des questions ! Donc rien de vraiment négatif là-dedans, d'autant plus que le film prend son rythme rapidement. Les scènes du films distillent peu d'informations, les dialogues sont quasiment inexistants, l'intrigue est insaisissable, seule la narration délimite vaguement l'action. C'est plutôt dérangeant à première vue car on ne saisit pas l'objectif, alors qu'il est sous nos yeux : les émotions. Chaque scène est très poignante, et c'est toute l'essence du film !
On vit le film à travers les yeux de Hushuppy, du haut de ses neufs ans elle perçoit son monde hostile et apocalyptique avec une extrême force. Ses repères sont ceux qui lui permettent de survivre, et ils sont bouleversés par les évènements. Ils s'effondrent les uns après les autres et elle ne peut plus croire en rien, sinon en sa propre force. Elle est dépassée par ce monde terrassant et incompréhensible, sa vie qui était déjà en autarcie précaire, dans une communauté grégaire, n'était guidée que par la communion avec la nature, et voilà qu'elle se déchaîne sans raison...
Elle lutte contre et avec son monde, passant par toutes les émotions. Peur, rage, méfiance, respect, amour... c'est tout l'enjeu du film que de les faire vivre ! Et force est de constater qu'il est efficace ! L'atmosphère intense est soutenue par une bande-son puissante, riche d'une bonne diversité instrumentale, elle apporteson lot d'émotions à chaque scène. Celles-ci sont sublimées par la réalisation, d'abord par la narration simple, puis par l'insertion d'images intercalaires, qui illustrent ce monde en perdition, en passant par les apparitions mystérieuses des énormes Aurochs...
Ils représentent ce monde terrible où la loi du plus fort règne, où survie rime avec humilité. Et font du film une sorte de quête initiatique de Hushpupy.

Pour finir le très bon jeu des acteurs rend largement grâce au reste, on retiendra évidemment la perfomance de Quvenzhané Wallis.
L'influence de l'homme sur la nature est évidemment La question posée par le film. La liste des 'odes à la nature' s'allonge encore et ce n'est sûrement pas près de s'arrêter ! Mais elle s'offre le luxe de se démarquer complétement de toute autre, ici pas de nature luxuriante et verdoyante, la nature est là torturée, boueuse, mais huspuppy apprends à vivre avec elle, à la respecter et à l'aimer.

Ce film est un ovni inattendu, fort de poigne et de poésie, une belle surprise de fin d'année !

 Ma note Speed : SSSSS