Interview: Samba de la Muerte

Vendredi 7 octobre, au Manège à Lorient, se produisaient deux groupes axés electro : Aufgang et Samba de la Muerte, et malgré ce genre commun, la musique qu'ils ont joué s'est avérée assez différente l'une de l'autre. Cela constitue indubitablement une preuve de la diversité du genre, qui n'englobe pas une manière de penser ou de jouer, mais simplement une présence instrumentale particulière et qui permet une immense liberté d'expression musicale.

 

Concert:

Le premier concert, de Samba de la Muerte, nous a offert un panel de chansons variées, dont beaucoup provenaient du premier et récent album du groupe : Colors. Néanmoins, nous avons aussi retrouvé certaines chansons plus vieilles, venant des EPs, comme Fire.

Les membres du groupe sont quatre, le chanteur, le guitariste, le bassiste et le batteur, mais présentés ainsi nous pourrions imaginer avoir affaire à un groupe de rock des plus communs, or chacun des individus varie dans son jeu et certains ne cessent de passer d'un instrument à l'autre. Nous avons ainsi un chanteur-clavériste-guitariste, un guitariste-percussionniste-clavériste, et ainsi de suite.

La musique de Samba de la Muerte est riche et dynamique, elle nous étonne et n'est jamais redondante. Elle sait nous créer un univers particulièrement envoûtant, dansant, psychédélique et tout simplement beau.

Sur scène, chacun des membres de Samba de la Muerte semble s'éclater, aime sa musique et est passionné par cet art. Leur bonne humeur et leur implication dans le spectacle se retranscrit par des sourires, de la sueur et une puissance de son impeccable, sublimée par l’ingénierie lumineuse et sonore du Manège (mais qui pouvait avoir tendance à privilégier certains instruments à d'autres, si bien que par moment le chant était étouffé par la batterie).

 

Samba de la Muerte est, en définitive, un groupe que l'on peut aller voir les yeux fermés. Ils créent une musique vivante et efficace, une musique colorée qui plaira aux amateurs de pop ou d'electro, mais certainement pas que. 

Archive esperanz africa 2014

 

Interview :

D'où vient le projet de Samba de la Muerte ? Comment Adrien LePrêtre a-t-il rencontré les autres membres du groupe ? Pourquoi ce nom de groupe ?

Le projet est né chez Adrien LePrêtre, à Caen, il en est le créateur. En effet, alors qu'il rentrait d'une tournée avec son autre groupe ConcreteNails, il ressentit l'envie de composer quelque chose de plus personnel. Il faisait déjà de la musique dans son coin depuis un certain temps. Il avait alors pas mal tâtonné, essayé beaucoup de choses, et le projet s'est donc formé au fur et à mesure.

Il a ensuite été amené à faire écouter ses créations à divers amis qui furent séduits, dont l'un d'eux est le compositeur de musique électronique Superpose. Ce dernier, qui voulait alors créer un label à Caen, invita Adrien à faire un premier EP et lui dit de trouver un nom.

C'est en écoutant le groupe nommé GaBlé, de Caen lui aussi, qu'Adrien découvrit un morceau intitulé Samba de la Muerte, qu'il trouva alors très beau et qui correspondait à la musique qu'il voulait composer. Samba de la Muerte lui évoquait quelque chose entre la danse, la mélancolie et la tristesse, ce qui correspondait à la vision qu'avait Adrien du Monde.

Ainsi naquit le projet Samba de la Muerte, en 2012, avec l'EP du même nom. Il fallu ensuite monter un groupe, pour pouvoir commencer les concerts, d'abord à Caen puis en dehors, car, et cela surprit presque Adrien, des gens s'intéressèrent à sa musique et lui proposèrent de jouer à d'autres endroits.

Ils furent tout d'abord trois, et cela évolua avec la musique qu'Adrien composait jusqu'à la formation actuelle du groupe. Les autres membres du groupe sont, pour la plupart, des connaissances de longue date d'Adrien. Corentin et Martin, respectivement le guitariste et le bassiste, connaissent le chanteur-compositeur grâce à Concrete Nails, où ils jouaient ensemble. Philippe, le batteur, rencontra Adrien alors que celui-ci l'avait vu jouer à plusieurs reprises et avait alors été impressionné par son jeu.

 

samba de la muerte + concrete knive tournée 2014

 

Votre musique ne se limite pas au territoire français, vous avez déjà fait des concerts au Québec, en Belgique ainsi qu'en Suisse, et votre dernier album, Colors va être diffusé sur une plate-forme d'écoute mexicaine, c'est cela ?

Oui, en effet. Quand l'album est sorti, il est paru en France, en Suisse, en Belgique, et au moment de sa diffusion, le groupe l'envoya au responsable de l'émission Bandcamp Weekly, sur Bandcamp, qui sélectionna alors l'une des chansons et la passa dans son programme. Un label mexicain, qui écoutait alors l'émission, découvrit le projet d'Adrien LePrêtre et le contacta, lui proposant de sortir l'album dans toute l'Amérique du sud. Quand on s'appelle Samba de la Muerte c'est une occasion à ne pas louper !

 

Vous vous imaginiez seulement pouvoir jouer en concert à l'étranger, aux débuts du projet ?

Adrien espérait, en effet, avoir cette opportunité, et ne sachant jamais vraiment quand ce genre d'occasion peut se présenter... Il nous confie que le fait d'être allé jouer au Canada avait constitué une chouette expérience, l'idée de jouer loin de chez soi, de prendre l'avion, etc, sont de formidables premières expériences pour un groupe.

Sinon, Samba de la Muerte joue souvent en Suisse et les membres ressentent qu'ils ne sont alors pas en France, le dépaysement y est génial, l'accueil super et le public très réceptifs à leur musique.

 

Votre musique s'est vue attribuer un genre d'appartenance : Electronic, Pop et Sono Mondiale. Est-ce votre volonté directe d'avoir créé un tel style de musique ? Visiez-vous particulièrement ces genres ?

La volonté première aurait été de ne pas être classé. Après il est nécessaire qu'il y ait des repères pour les auditeurs. Avant de mener l'interview, Adrien discutait avec deux filles qui ne savaient pas vraiment comment définir la musique de Samba de la Muerte quand elles en parlaient à d'autres personnes, le chanteur leur répondit alors de la décrire comme elles le souhaitaient en fonction d'avec qui elles discutaient.

Avant de faire les Trans Musicales à Rennes, en 2013, Samba de la Muerte avait joué deux fois devant des classes de collèges et après le concert, une rencontre avec ce jeune public avait été faite. Les enfants disaient alors aux membres du groupe qu'ils avaient adoré tel ou tel morceau, le définissant avec des termes plus ou moins obscurs. Les jeunes apparentaient la musique à des genres selon leur ressenti.

Après, pour Adrien, Samba de la Muerte c'est de la pop, car le groupe présente des chansons avec un format plus ou moins longs, et là-dessus sa base de travail est de la musique électronique et des rythmiques africaines, tout du moins c'est le cas pour Colors.

 

Pensez-vous que classifier un groupe c'est un peu réduire sa portée pour le public ?

Pour Adrien, ça dépend des groupes. Il raconte que plus tôt, quand il était au lycée, il détestait la Pop, il aimait alors le Reggae, le Dub, ce genre de choses... à l'époque, la pop ça ne lui paraissait pas du tout intéressant. Puis, à la suite de la visite de l'exposition sur John Lennon à la Villette, il s'est mis à écouter les Beattles et a alors découvert ce qu'était la Pop, pas forcément quelque chose de niais mais plutôt une musique d'une grande richesse.

Par la suite, Adrien s'est retrouvé à jouer dans un groupe de Pop où les membres étaient inspirés par des choses qu'il adorait, qui n'étaient pas particulièrement assimilables à la Pop, et il s'est alors rendu compte que dans ce genre, on peut mettre à peu près tout ce que l'on veut.

Sa définition de la Pop est alors claire : c'est de la chanson, plutôt en anglais, et on agrémente ce chant d'à peu près ce que l'on souhaite. Il cite alors Vampire Weekend qui livre une Pop africaine munie de plein de riffs d’Éthiopie, ainsi que Fool's Gold.

 

Quels artistes peuvent être cités parmi vos références ?

Adrien peut compter dans ses références les deux groupes précédemment cités. Il nous confie aussi que ce qu'il aime voir en concert c'est de la musique pure, sans chant, pas la Pop, s'aventurant même à dire que le prochain album de Samba de la Muerte pourrait être composé sans qu'il chante. Mais il confie aussi qu'il ne pourrait peut-être pas s'arrêter de chanter, qu'il est fasciné par Bon Iver qui vient de sortir un album et dont la voix le subjugue. Ce chanteur est d'ailleurs celui qui a inspiré Adrien au tout début de Samba de la Muerte. D'autres chanteurs constituent aussi des sources d'inspiration, tels que PJ Harvey, Fela Kuti, et aussi tout ce qui touche à l'Afro Beat.

 

Qu'est ce qui vous inspire pour la composition parolière et instrumentale de vos chansons ? Que souhaitez-vous transmettre par votre musique ?

Sur Colors, Adrien a voulu transmettre sa vision du monde, une vision à première vue très colorée mais, dans le fond, qui évoque des sujets plus sombres, plus tristes, qui le touchent. Ses chansons sont écrites sur des thèmes assez précis, mais aux yeux du chanteur, l'ensemble brasse des thèmes assez larges. Il continue en disant que le sort actuel du Monde le déprime un peu, la façon dont les choses évoluent, le rapport social et le respect mutuel qui se perdent, et que face à tout ça, il ne sait pas trop quoi faire si ce n'est de la musique. Cependant il veut rester optimiste, garder les pieds sur terre, essayer de faire changer les choses et au moins parler des problèmes qui ternissent le Monde.

 

Comment avez-vous trouvé Sarah Guillain, l'artiste à l'origine de la pochette d'album Colors. Son style sobre mais coloré vous avait-il paru comme évident concernant l'image que vous vouliez donner à votre album ?

Sarah Guillain et Adrien LePrêtre se connaissaient déjà car ils sont en couple. Le style de l'artiste semblait déjà adapté aux attentes du groupe, car ses collages au style épuré parlaient beaucoup au chanteur. Ce dernier raconte qu'alors qu'il était parti en Normandie avec Corentin et Sarah, avec l'idée qu'il faudrait finir l'album sous peu, un système s'était mis en place. Corentin et Adrien jouaient et composaient dans une pièce, Sarah, de son côté, dans la salle voisine, pouvait écouter les morceaux et construire ses collages par rapport à ce qu'elle entendait.

De cela, divers visuels furent créés, et celui de la dune (pochette actuelle de l'album) fut l'un des premiers, mais l'idée d'utiliser ce collage-ci en tant que visuel de Colors ne vint pas immédiatement à l'esprit d'Adrien et Corentin. Toutes les œuvres de Sarah furent ensuite créées, dix au total, une pour chaque chanson de l'album, mais l'idée du visuel de l'album n'était toujours pas décidé. Un mois d'essais passa, durant lequel Sarah composa divers collages, essayant de mixer ceux des dix chansons de Colors. Finalement, c'est en essayant de visualiser le collage de la dune en tant que pochette d'album qu'il devint évident que c'était celui-ci qu'il fallait. Pour Adrien, cette dune retranscrit le désert et donc la chaleur de l'album.

 

Quels sont vos projets futurs concernant le groupe ?

Samba de la Muerte a encore quelques concerts jusqu'à fin novembre, ainsi que quelques dates en février et mars. Le groupe est également dans l'éventualité de travailler dans le cadre d'un ciné-concert. Les membres de Samba de la Muerte ont chacun leurs propres projets en dehors, notamment avec l'arrivée d'un nouvel album de Concrete Nails. Concernant un nouvel album pour Samba de la Muerte, aucune date n'est déterminé. Il faut laisser le temps aux idées de mûrir.

 

kENAN ET ERWAN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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